
Appel à dons pour financer et développer un test d'enquête environnementale à base de graines sous licence libre
- 18 minsEn 2015, sur le bief de partage du canal de Nantes à Brest à Glomel (22), je démarrais des expériences en écotoxicologie dans les eaux locales (le canal, le bief, le lac du Korong). Depuis 2019 je travaille sur la conception, les tests, et déploiement d’un ensemble de méthodes et techniques de tests environnementaux sur les qualités de l’eau et des sols. Je fais cela avec l’objectif que ce dispositif soit utilisable dans votre cuisine, votre cave, votre garage, votre squat, votre cabane et même depuis « lieux de privation de liberté (►►) »
Ce matin j’ai vécu une petite scène, presque quotidienne pour ma part, qui a déverrouillé en moi une motivation et un sentiment de rassurance (dont j’avais bien besoin).
Je ramasse ~50 centilitres d’une flaque d’eau au milieu d’un square. Elle est bien irisée dans ses reflets.
Une dame, qui a terminé son obligation de se sacrifier au travail il y a bien longtemps, passant juste devant moi me demande ce que je fais.
« Je ramasse cette eau puis je la mets dans des petits pots en verre en différentes quantités avec de l’eau distillée. Ensuite j’y mets des graines de radis et j’observe, photographie et consigne les observations pendant 10 jours. »
Silence, et second silence, et regards qui me décortiquent…
« Vous faites cela pour quel laboratoire ? » me dit-elle.
« Pour vous, pour les enfant⋅e⋅s, pour moi ».
[Yeux écarquillés et sourire]
Je remarque que les trois ouvriers perchés sur les échafaudages de la façade attenante, en chantier, se sont arrêtés et nous observent en silence.
Je me souviens qu’hier j’avais reçu un courriel en provenance de matière grise d’université et d’Enseignement Supérieur et Recherche (ESR) classant cela dans « architecture oppositionnelle et contre-école ». Quel curieux lexique !
Il y a là dans mon tendre vendredi anecdotique au moins 4 points de vue qui se collisionnent au travers d’un petit geste et de quelques mots pour l’accompagner dans un sujet plus vaste qu’est celui de l’écologie et de la qualité de notre environnement (et de nos responsabilités et capacités d’agir).
Ce que je fais à du sens et de l’importance. Je l’ai fait et continue à la faire en Bretagne, en Dordogne, en Belgique, en dans des vidéoconférence pour des personnes des dizaines de pays du globe. Bientôt ailleurs, j’espère, avec une bonne dose de confiance.
Enfermée dans un laboratoire, et réservée à de petits groupes d’une « élite », l’enquête environnementale, et les questions de pollutions sont le fait de privilèges. J’essaie d’en faire un mode d’action politique qui est un droit populaire plus qu’un privilège.
Dans la même veine que des milliers de personnes qui surveillent la qualité de l’air environnant, que d’autres partagent les données de biodiversité, nous pouvons agir de manière similaire sur l’eau et les sols. C’est alors créer un bien commun des moyens de production.
Table des contenus :
- Un appel aux dons sur quoi et pouruqoi ?
- Combien d’argent, où donner et pourquoi faire − et que pouvez-vous donner si vous n’avez pas d’argent ?
- Que se passera t’il si je ne reçois pas 3 800 € ?
- Quelques précédentes étapes clés pour cette petite histoire
Un appel aux dons sur quoi et pourquoi ?
Prélever de l’eau dans un caniveau à côté d’un chantier, ou dans un rivière, ou les eaux de pluie, ou filtrer la terre d’un sol… puis y placer des graines et observer leur germination (ou absence) et formes et couleurs de ce qui germe, c’est une manière simplifiée de vous dire que je fais des bioessais sur le « terrain ». Avec des graines et un milieu liquide, il faut 5 à 8 jours pour obtenir des résultats observables avec des différences significatives.
Je débauche des énergies et du temps son compter pour arriver à la conception d’un « bioassai » avec sa recette de fabrication et sa mise en œuvre sous licence libre qui soient effectivement appréhendables par les personnes qui en ont l’envie et besoin, et cela dans les conditions de vie quotidienne qui sont les leurs. Dans la même temporalité j’ai glissé dans la grande précarité et n’ai pas accès à mes droits aux minima sociaux, ni autres couvertures.
Ce travail prend déjà forme en deux langues au travers des documentations existantes :
- Investigating Water with Seeds dans Public Lab
- Initiation aux essais biologiques avec des graines pour exposer la toxicité dans l’eau dans le wiki du Biohackerspace Kaouenn Noz
Ces débuts de « recettes mises à disposition » sont à améliorer et les expérimentations sont à poursuivre afin d’affiner la méthode, le protocole, et le « kit ». J’ai d’ailleurs écrit ce matin à Donat Hader et Gilmar Erzinger, auteurs de “Bioassays Advanced Methods and Applications” (SBN: 978-0-12-811861-0), pour leur demander de l’aide.
« D’autres considérations pour un essai biologique praticable sont la robustesse de l’instrument et une longue durée de conservation dans le cas de biomatériaux tels que l’ADN extrait, les bactéries lyophilisées ou les graines de plantes. » “A comparison of commonly used and commercially available bioassays for aquatic ecosystems” Azizullah Azizullah and Donat-P. Häder in “Bioassays Advanced Methods and Applications”
Cette recherche et développement fait suite au guide, sous licence libre, que j’avais rédigé en 2020 « Bio-investigations sur le Terrain (disponible en français et en anglais). Ces efforts sont aussi une partie du projet Hack2O dans lequel je mettrais tout autant d’engagement très prochainement.
Aujourd’hui je vous écris à vous aussi en vous demandant votre aide.
Cette recherche et développement que je mène est contenue dans un cadre de critères :
- Doit être reproductible et répétable (sinon, ce n’est qu’une performance).
- les « défaillances », y compris dans la « reproductibilité » sont considérées comme essentielles
- Le Lent travail de Debug est souhaitable (valable bien au-delà du code informatique)
- Publication, données, documentation en gratuité et licence libre ; logiciel, dispositif, hardware, wetware sous licence libre (gratuité au plus possible).
- Véritable ouverture (c’est-à-dire accessibilité et inclusivité).
- Respect des différents rythmes et façons de procéder, entre et au sein des vies/individus/pratiques
- La matérialité de l’accès aux équipement de base pour ce « kit / test », et les différences selon lieu de vie/statut social/ressources économiques, sont considérées avec grande attention (exemple accès à des graines, accès à des récipients en verre, temps disponible pour réaliser le bioessai, etc.)
- Impliquer les contributeurices “citoyen⋅nes” en tant que pairs (c’est-à-dire au niveau « co-auteurices » à minima).
- Méthodes qui mettent l’accent sur les valeurs d’humilité, d’équité et de bonne relation avec l’environnement, dont le non-humain et le non-vivant (exemple https://civiclaboratory.nl).
- Prise en considérations des enjeux politiques, des menaces potentielles et effectives pour les individus qui pratiquent
- Sûreté, sécurité individuelle et collective et numérique (oui, peut en France faire de la garde à vue pour des prélèvements d’eau ou avoir affaire au parquet national antiterroriste (PNAT) ou vouspouvez être menacé⋅e⋅s par un⋅e voisin⋅e avec un outil ou une arme)
- J’ai contribué et donné des formations sur :
- Exposing The Invisible https://exposingtheinvisible.org/
- Gendersec , Gender & Tech Ressources
- DataDetox Kit https://datadetoxkit.org/fr/home
- Security in a Box https://tacticaltech.org/projects/security-in-a-box/
- The GlassRoom https://theglassroom.org/
- J’ai contribué et donné des formations sur :
Il y a une sorte de bonus caché sous cette somme de travail : j’y développe aussi et conjointement des appareils / aides techniques « lowtech » sous licence libre qui viennent en complément et/ou en besoin avec les bioessais à base de graines :
Dans les champs de l’écotoxicologie et des bioassais, le standard de qualité scientifique est nommé ECOTOX, crée par l’INRA en 2009, encadré par la norme ISO 6341 (2012). Il se déroule sur daphnies juvéniles placée dans un milieu dans lequel on suspecte ou l’on connait la présence d’un perturbateur chimique / polluant ou d’un cocktail d’agents. Le paramètre mesuré est l’inhibition de la nage, mouvement et capacité de déplacement, pendant 24 à 48h. C’est ce point d’horizon qui pourrait me servir de comparaison avec les bioassais à base de graines. Avec les graines, autre standard, il y a celles des Arabidopsis thaliana Col-0 ecotype qui sont organismes modèles de références en biologie. Celles-ci étant quasi-impossibles à obtenir pour une personne hors d’un laboratoire spécialisé, et encore plus difficile de les vérifier ensuite. La très petite taille des graines en font un objet diffcile à manipuler et une piètre candidate pour l’observation à l’œil nu / appareil photo « grand public ».
Pour pratiquer des « vérifications » sur les résultats obtenus avec les prototypes de bioassais avec graines, et aussi pratiquer des expérimentations en écotoxicologie parallèlement à ceux-ci, j’utilise le matériel biologique libre de Standford Free Genes sous convention ouverte de transfert de matériel (OpenMTA). Il existe maintenant petit réseau qui permet d’obtenir ces wetware gratuitement ou au cout d’un envoie postale.
Il y a un certain nombre de conditions préalables à la mise en place d’un système de bioassai moderne efficace :
- Le ou les paramètres du système doivent être très sensibles pour la substance toxique analysée/visée.
- Le temps de réponse doit être « rapide »
- L’essai biologique doit pouvoir être utilisé pour des mesures aiguës (à court terme) ou à long terme.
- Le dispositif doit être facile à utiliser et ne pas nécessiter une longue formation du personnel.
- Le prix ne doit pas être excessif, surtout lorsqu’il est destiné à être utilisé dans les pays en dit en développement.
- Le matériel biologique doit être facilement accessible et les coûts de fonctionnement doivent être faibles.
Combien d’argent, où donner et pourquoi faire − et que pouvez-vous donner si vous n’avez pas d’argent ?
3 800 € à recevoir en dons avant le 31 janvier 2022, voici l’objectif ! (et mon sauf-conduit pour traverser la précarité et dans un département qui veut conditionner l’accès au RSA [dont mon dossier est en attente] à 20h de travail sans les acquis et sans les droits du travail).
Pour l’année 2022 j’ai reçu 3 902,19 € de dons via Liberapay. Majoritairement à partir de Juin de la part de personnes qui m’ont aidé à ne pas tomber plus précaire que je l’étais déjà.
Il est possible de faire un don avec une carte bancaire ou par virmement, les devises acceptées sont : € ; $ ; $AU ; $CA ; CHF ; £.
Je reste donc avec un appel aux dons via Liberapay ici. Pas de site web de service de « crowdfunding » car ce serait rentrer dans un jeu de concurrence avec d’autres projets et je n’ai ni le temps ni l’énergie pour cela, aussi je n’ai pas cette forme de compétition. De plus, ce serait vous amener à fournir de vos informations personnelles à ces « plateformes » et ça c’est non sans détour.
3 800 € pour :
- 3 mois de travail (février, mars, avril), soit 1 000 € par mois
- Corriger et améliorer les documentations existantes
- ajouter « Comment choisir les graines pour les essais biologiques et où les trouver ? »
- ajouter « Comment choisir l’équipement et le matériel »
- Refaire des séries de bioassai avec micro-dosages et différentes graines
- Comparer avec d’autres protocoles et expériences puis évaluer les différents standards
- Réaliser des comparatifs entre le mode « depuis ta cuisine » et « laboratoire d’analyse » sur les protocoles et les résultats
- Corriger et améliorer les documentations existantes
- Animer 3 ateliers de 5 jours consécutifs chacun dans des lieux/communautés en demande (voir le chantier d’octobre 2022 Louzaouiñ Graines de luttes 2022)
- Avec des méthodes en éducation populaire
- Avec une demi-journée « Biopanique, cuisine et féminisme »
- Mettre tout cela en documentation
- 800 € de frais
- 500 € de déplacement (Sud France, Nord Italie, Belgique)
- 300 € de matériel
- équipements pour expériences avec les standards de référence dans les laboratoires classiques
- consommables divers (micro-tubes, eau distillée, réactifs, papier Whatman, etc.)
Si vous n’avez pas d’argent, vous pouvez aussi donner un peu de :
- de votre capital social : en mobilisant vos réseaux et relation et relayant cet appel au don avec un petit mot de votre part
- de votre temps en discutant avec moi
- de vos crayons / logiciels libres si vous avez quelques savoirs en illustrations
- de vos équipements / matériels qui ne vous seraient pas utiles et qui pourraient aider dans cette aventure.
Que se passera t’il si je ne reçois pas 3 800 € ?
Don et contre-dons, je suis obligé envers vous par relation « […] de la promesse, d’une promesse qui exige la confiance de tous envers tous et s’en nourrit »
Quoi qu’il advienne de mon appel ici écrit, le travail d’investigation environnementale continuera et les prototypages aussi. Je ne sais à quel rythme ni dans quel délai. Aussi, j’ai D’ores Et Déjà engagé des interviews avec hacktivistes de l’eau au Pakistan et à Hawaï pour ce début d’année pour diffuser leurs actions et peut-être apporter un peu de soutiens. De plus, j’ai lancé cette semaine 3 séries de bioassais avec des graines dans la première série un échelonnement d’eau prélevée sur un parking automobile et dans la seconde un échelonnement avec micro-dosage inférieur ou égal à 0,1 ml de gasoil dans de l’eau distillée, la troisième micro-dosage inférieur ou égal 0,01 ml.
J’écrirais tous les détails de cette quête et des dons le premier week-end de février ici sur mon blog.
Quelques précédentes étapes clés pour cette petite histoire
- 2002 à 2012, Section Opérationnelle Spécialisée en dépollution, BMPM, Marseille
- Écotoxicologie, en 2015, sur le bief de partage du canal de Nantes à Brest à Glomel (22)
- Les ateliers « Biopanique, cuisine et féminisme » depuis 2016
- Les IndieCamps (2016 à 2022)
- Les cours en école d’ingénieur⋅e⋅s des Métiers de l’Environnement (2017 à 2020), et UT Compiègne
- L’action Rivières Pourpres (2019)
- Frugal Science (2020) du Prakash Lab, Standford
- Tactical Tech et Exposing The Invisible (2019 à 2022)
- Bruxelles et Liège, Belgique (2022)
- Chantier Reprises des savoirs, Pluri-versités, Rennes, France, octobre 2022
- Hack2o (2023)
Merci à toutes les personnes qui soutiennent les efforts par leurs dons

Xavier Coadic
Human Collider